Juifs et chrétiens aux premiers siècles

Mettre à contribution 25 chercheurs dont beaucoup sont connus¹, est un exploit pour  le directeur de publication et contributeur (Dan Jaffé), pour les éditeurs (Renaud Escande et Mehra Amir-Moezzi) et pour le lecteur non averti.

Le sujet abordé au long de ces 771 pages, Juifs et chrétiens aux premiers siècles, ne peut que susciter la curiosité des habitués des recensions de Chrétiens de la Méditerranée. Il s’agit d’un « ouvrage à caractère encyclopédique. »

Au préalable, il leur est conseillé de parcourir le sommaire et la préface de Dan Jaffé, puis de faire connaissance avec les contributeurs. Ce sont des spécialistes de l’histoire, l’histoire des religions, la spiritualité, la théologie, les uns plus connaisseurs de patristique et les autres des  commentaires du Talmud.

Cet ouvrage fournit, au lecteur francophone, une présentation actualisée de la recherche contemporaine sur les liens qui rapprochent ou qui distinguent chrétiens et juifs au cours des premiers siècles de notre ère. Le lecteur est invité à prendre position dans le débat lancé par Dan Jaffé : pendant combien de temps juifs et chrétiens ont-ils cheminé côte à côte avant de se séparer ? Une fois  adopté un point de vue, il restera au lecteur à prendre position sur la situation dans laquelle nous nous trouvons aujourd’hui, dans un monde où la pratique croyante ne cesse d’interroger.

La réflexion proposée au lecteur comporte quatre parties. La première est consacrée à Jésus de Nazareth, Paul de Tarse dans le monde juif de leur temps. La deuxième s’intéresse aux Rabbis du Talmud et [aux] judéo-chrétiens. La troisième, intitulée Pères de l’Eglise, juifs et judaïsme, examine la manière dont les Pères de l’Église parlent des juifs et de la religion juive. La quatrième porte sur Judaïsme et christianisme : pratiques, croyances et doctrines.

Parmi les 25 contributions proposées, deux seulement seront mises en avant, de manière apéritive : celle de Dan Jaffé et celle de Bernard Pouderon.

A propos des Chrétiens, judéo-chrétiens et rabbis du Talmud (I^er-IIIᵉ siècles), Dan Jaffé écrit : « La séparation entre juifs et chrétiens est le fruit d’une décision des élites dirigeantes et non du peuple. Les motivations des instances juives et chrétiennes étaient de l’ordre du social, du politique et souvent le discours théologique n’est qu’un décor dissimulant d’autres aspirations plus profondes. Les Rabbis du Talmud et les Pères de l’Église ont progressivement imposé leurs normes exclusives et forcé leurs communautés à les accepter. » (p. 218)

Dans la partie intitulée Pères de l’Eglise, juifs et judaïsme, Bernard Pouderon aborde Les prémices de la séparation : chrétiens et Juifs dans la première moitié du IIᵉ siècle en ces termes : « La diversité des positions témoigne d’une évolution dans les relations entre les deux communautés, depuis un sentiment d‘appartenance commune prenant en compte la différence, jusqu’à la rupture et au rejet en passant par la contestation ou la dissidence. Mais elle tient aussi à la diversité des milieux qui les portent, le discours devenant plus âpre quand l’adversaire se fait plus présent. (p. 414). […] C’est au sein de la hiérarchie qui se met progressivement en place que se manifestent les premiers signes du conflit. (p. 401) […] La séparation, voire la rupture, ne s’est pas produite uniformément, et pas de façon aussi tranchée que certains des écrits pourraient le faire croire : les échanges et le dialogue entre les deux communautés ne se sont pas taris avec la définition progressive du fait chrétien. » (p. 414)

Marc Ameil

Note de la rédaction

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