Titre
L’Église et la diversité des religionsAuteur
Henri de La HougueType
livreEditeur
Paris : Salvator, 2020Nombre de pages
186 p.Prix
18,80 €Date de publication
7 août 2021L’Église et la diversité des religions.
Comment un chrétien peut-il envisager la pluralité des religions, dans une démarche d’estime pour les autres croyants ? Comment peut-il, sous l’interrogation de la foi des autres, être conduit à approfondir la compréhension de sa propre foi ? Dans cet ouvrage pédagogique, le père Henri de La Hougue1 répond avec netteté à ces questions, et à quelques autres d’importance, dont celle du sens à réserver au vieil adage “hors de L’Église, point de salut” trop longtemps mal utilisé, trop souvent encore mal compris.
La formule retenue par l’auteur est celle d’un ensemble de questions et réponses (77 au total), comme par exemple “Entre chrétiens, juifs et musulmans, peut-on dire que nous avons le même Dieu ?” ou “Peut-on considérer que le pluralisme religieux fait partie du plan de Dieu ?”. Ces questions et réponses se répartissent en quatre chapitres : le comportement face aux autres religions dans la Bible ; le regard porté par l’Eglise sur les autres religions au fil de l’Histoire ; les formes et conditions du dialogue interreligieux ; et enfin, les débats théologiques actuels, avec en conclusion une “petite synthèse” qui va à l’essentiel. La bibliographie qui complète l’ouvrage est centrée sur la théologie chrétienne des religions, avec en sus quelques ouvrages bien choisis pour le contexte musulman, le contexte juif, et celui des religions d’Asie.
Au cœur de ce livre, une interrogation essentielle dont l’auteur montre qu’elle a, dès l’origine, « “travaillé” les chrétiens : dans quelle mesure pouvons-nous reconnaître la présence et l’action de Dieu dans la vie des personnes d’autres religions ? La réponse que l’auteur formule s’appuie directement sur les textes de la Tradition chrétienne jusqu’au concile Vatican II qui l’exprimera en des termes renouvelés et féconds2 ; et elle tient en quelques mots : “L’action de l’Esprit du Christ déborde les frontières visibles de l’Église” (p. 168). Le pluralisme religieux n’est donc pas seulement une donnée de fait, indépassable à vue humaine, c’est aussi un témoignage de la richesse culturelle et spirituelle de chaque personne, de chaque peuple (pp. 105 à 107).
Faisant une large place au contexte de l’islam, dont il relève que c’est la deuxième plus importante religion dans le monde et en France, le père de La Hougue nous invite à regarder positivement ce qui se vit dans les autres religions. Sans nier les différences fondamentales entre les religions, sans opter pour un relativisme ou un syncrétisme, il nous invite à “faire crédit à l’autre du meilleur” de ce que sa foi énonce et de ce qu’il vit dans sa foi. Malgré les tensions qui peuvent exister entre les représentations religieuses, il nous appelle à reconnaître la cohérence propre à chaque manière spécifique de confesser, vivre et célébrer sa foi. Ainsi pour les musulmans, explique-t-il par exemple, “c’est au nom d’un infini sens de l’unicité de Dieu que l’idée d’incarnation est refusée et au nom d’un immense respect pour le prophète Jésus que l’idée d’une mort sur la croix est refusée” (p.169). C’est donc avec estime que nous pouvons considérer les “rites sacrés” des autres, car “toute prière authentique est inspirée par l’Esprit Saint et arrive en dernière analyse à Dieu”.
Faire crédit à l’autre du meilleur de sa foi s’avère une démarche d’”ouverture féconde” (p.154), car elle est pour le croyant la source d’un approfondissement de sa relation à Dieu. Le chrétien doit en effet tenir que “l’offre de salut proposée par le Christ concerne bien l’humanité entière” et que le don que Dieu fait de lui-même aux hommes “passe toujours (…) par la médiation de Jésus-Christ et l’œuvre de son Esprit” (p.163). Il est appelé à reconnaître que les “rayons de la vérité”, que le concile Vatican II invitait à découvrir dans les autres religions, nourrissent la foi de leurs fidèles, les rendent plus ouverts à Dieu et aux autres (p.159) et peuvent ainsi se voir reconnaître, en termes chrétiens, “une valeur salvifique”.
Cohérent et bien argumenté, ce livre appelle donc le chrétien à considérer positivement ce qui se vit dans les autres religions. Il répond de façon construite et convaincante à bien des questions que font naître, en nous et autour de nous, le pluralisme religieux et le dialogue interreligieux. Il se conclut par l’appel à une collaboration salutaire entre chrétiens et non-chrétiens, notamment pour les œuvres faites auprès des plus petits et des plus pauvres : car c’est participer ici et maintenant à la venue du règne de Dieu (pp.170-171).
Bertrand Wallon
Secrétaire général des Amis de l’IDEO
Administrateur de Chrétiens de la Méditerranée
1 Le père Henri de La Hougue est un théologien, actuellement curé de la paroisse Saint-Sulpice à Paris, et spécialiste de la théologie des religions qu’il enseigne à l’Institut de Science et de Théologie des Religions (ISTR) de l’Institut catholique de Paris. Il est de longue date engagé dans le dialogue islamo-chrétien, au sein du Groupe de Recherche Islamo-Chrétien (le GRIC). Il est l’auteur de plusieurs ouvrages, dont L’estime de la foi des autres.- Desclée de Brouwer, 2011 et, avec Saeid Jazari Mamoei, Dieu est-il l’auteur de la Bible et du Coran ? – Salvator, 2016.
Note de la rédaction :