Titre
Marseille, ville du mondeSous titre
L'internationalisation d'une métropole morceléeAuteur
Nicolas Maisetti ; préface d’André DonzelType
livreEditeur
Paris : Éditions Karthala ; Aix-en-Provence : Sciences po Aix, 2017Collection
Questions transnationalesNombre de pages
304 p.Prix
24€Date de publication
18 septembre 2023Marseille, ville du monde : l’internationalisation d’une métropole morcelée.
Dans un contexte de mondialisation exacerbée, les villes, comme les territoires qui les entourent, cherchent à renforcer leur influence internationale. Ce livre applique cette observation à la ville de Marseille, qui voudrait être plus attractive pour les investisseurs, les organisateurs d’événements, ou même les touristes. Il analyse les conditions de l’internationalisation de la cité phocéenne.
Pour ce faire, il passe d’abord en revue le passé de Marseille ou plutôt les discours et les mythes sur ce passé, depuis sa fondation, mais aussi ce qui émerge dans les débats sur l’immigration, et les reconversions du port.
Le chapitre suivant entre dans des débats assez techniques sur les coopérations décentralisées, sur le Conseil international de la ville de Marseille, et sur le passage de ces coopérations par le niveau européen. On entre là dans une complexité digne des administrations publiques internationales.
L’ensemble du chapitre trois traite de l’action de la ville dans le cadre de la région Paca (Provence Alpes Côte d’Azur) pour se manifester à Bruxelles. L’Europe a créé une Union pour la Méditerranée en 20081 dont la destinée n’a pas été à la hauteur des attentes, ou, pour le dire en langage technique, dont les ambitions de la diplomatie décentralisée sont restées limitées. La région Paca a quand même poussé ses initiatives dans le domaine de l’innovation et de l’internationalisation des entreprises. Un bâtiment a symbolisé les espoirs et les déceptions de cette politique, c’est la Villa Méditerranée dont le destin est une parabole des frustrations de l’action régionale. Construite, en 2013, près du Mucem2 sur un lieu stratégique à l’entrée du Vieux Port, repérable par son geste architectural, “le plus grand porte-à-faux du monde”, elle devait être un espace de coordination des ressources institutionnelles dédiées aux politiques méditerranéennes de la Région. Il n’en a rien été. Après avoir accueilli diverses expositions et conférences, elle est devenue finalement l’écrin prestigieux de la fameuse grotte Cosquer, grotte paléolithique située à quelques kilomètres de là et découverte en 1991. L’inauguration de cette très belle réalisation culturelle en juin 2022, enterrait les prétentions régionales et politiques de la Villa Méditerranée3
Dans un quatrième chapitre, l’auteur fait un recensement des initiatives pour promouvoir la ville de Marseille. Elles se poursuivent, mais les outils de marketing urbain sont mis en échec par des blocages politiques et des luttes institutionnelles. Néanmoins, diverses installations de grandes administrations ont montré l’attractivité de Marseille, par exemple celle de L’Institut de Recherche pour le développement4 en 2008, comme celle de l’antenne marseillaise de la Banque Mondiale en 2000. La ville renforçait cette tendance en créant la “Semaine économique de Marseille” en 2007.
La labellisation de Marseille comme Capitale européenne de la culture en 2013 a amené 10 millions de visiteurs autour du Vieux Port. Cela montre bien comment les politiques d’image et une bonne communication peuvent ouvrir à un réel succès. Cette qualification a permis la réhabilitation architecturale du centre-ville et du front de mer. De même le label “French Tech” donné à la métropole Aix-Marseille a mis en valeur le tissu des entreprises innovantes et des start up de la région. C’est tout le territoire qui bénéficie de cette nouvelle visibilité.
Les effets de langage peuvent aussi avoir leurs conséquences : l’usage de plus en plus fréquent du terme Euro-Méditerranée à la place du simple mot Méditerranée, fait passer en arrière-plan les tensions dues à la migration, en insistant sur l’unité de toute la région, nord et sud, de cette grande mer intérieure. Cela vient compenser la faillite de L’Union pour la Méditerranée, et les déboires des révolutions arabes. Les thématiques discutées dans ce livre sont très pointues5, mais elles montrent bien les difficultés et les quelques succès de l’internationalisation de Marseille6.
Pierre de Charentenay
ICM, Chemins de dialogue
Notes de la rédaction
2 Visiter le Musée des civilisations de l’Europe et de la Méditerranée (Mucem)
5 L’auteur, Nicolas Maisetti est docteur en science politique de l’Université Paris I Panthéon-Sorbonne. Sa thèse (2007-2012) a porté sur les politiques internationales dans l’espace métropolitain marseillais. Chercheur associé au LATTS (Laboratoire Techniques, Territoires et Sociétés), il est directeur du programme POPSU Transitions au sein de la Plateforme d’observation des projets et stratégies urbaines (POPSU)
6 Voir sur le site de Chrétiens de la Méditerranée nos autres recensions sur la Méditerranée