Titre

Comprendre le monde arabe

Auteur

Béligh Nabli

Type

livre

Editeur

Armand Colin, Septembre 2013

Prix

22,50 €

Date de publication

3 mai 2014

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Comprendre le monde arabe

Tous les arabes ne sont pas musulmans et tous les musulmans ne sont pas arabes ; c‘est une évidence, mais, en ces temps troublés, l’ignorer permet des amalgames politiquement fructueux. Et cette incompréhension voulue ou inconsciente sous-tend toujours une représentation figée du monde arabe.

Parler du monde arabe c‘est accepter d’abord son unité : unité reposant sur une langue écrite classique, vecteur de transmission d’un héritage littéraire ancien et moderne ; unité aussi à travers la mémoire d’une histoire commune sous le règne des califes Omeyyades et Abbassides. Mais n’est-ce pas aujourd’hui une utopie ? Peut-être pas, car malgré les faits, il existe bien une conscience arabe, qui est supranationale.

Mais, comprendre le monde arabe c’est aussi comprendre les mondes arabes car de la Corne de l’Afrique à la Mauritanie les disparités sont nombreuses : historiques (depuis la fin de l’empire arabe), ethniques (berbères, égyptiens, bédouins…), linguistiques, religieuses (sunnites, chiites, chrétiens, juifs), politiques (monarchies ou républiques) ou économiques.

Le monde arabe moderne s’est essentiellement développé à partir de la première guerre mondiale, donnant naissance à des Etats-nations, construits sur un modèle occidental. Ce développement s’est effectué au sein d’une histoire propre à chacun d’eux, malgré quelques tentatives pour créer une nation panarabe qui ont abouti, à la naissance de la Ligue des Etats arabes, mise à mal aujourd’hui par les intérêts nationaux et les déséquilibres engendrés par la manne pétrolière des pays du Golf.

Mais une solidarité existe, car malgré les trahisons, les abandons, un inconscient collectif lie les arabes à la cause palestinienne : la Nakba (« grande catastrophe » de l’exode de 1948) reste une blessure pour la plupart des arabes. Mais ne nous y trompons pas « l’unité panarabe au nom de la cause palestinienne est plus rhétorique que réelle » comme le précise l’auteur.

Le monde arabe comporte près de 350 millions de personnes, avec une démographie forte mais qui a tendance à décélérer. Cette population, qui de rurale autrefois est devenue urbaine, est jeune, voire très jeune, souvent diplômée et sous-employée, consommatrice de nouvelles technologies et surinformée ; prête à s’enflammer, elle reste un des éléments générateurs des révolutions de 2011.

« Printemps arabes » ou « réveil arabe », il est sûr que depuis  2011 nous assistons à une mutation du monde arabe. Politiques, sociales, économiques, religieuses, les questions sont posées : sans doute, elles recevront des réponses différentes selon les États, les partis au pouvoir, l’adaptation de l’islam politique au jeu démocratique, etc. Mais le changement est déjà sous nos yeux.

Le livre de Béligh Nabli, directeur de recherche à l’Institut de Relations Internationales et Stratégiques (IRIS), très didactique et très riche, nous aide à dépasser clichés et idées reçues et nous rappelle que nous appartenons tous à une culture méditerranéenne commune qu’il serait dangereux d’oublier si nous voulons éviter un glissement du monde arabe vers l’Asie.

Francis Labes