Freud et l’homme juif

Titre : Freud et l’homme juif

Sous-titre : La claire conscience d’une identité intérieure

Auteur (s) : Emile H. Malet ; préface d’Avraham B. Yehoshua

Type : Livre

Editeur : Campagne Première, septembre 2016

Collection : En question

129 p.-16€

Sujet : Freud, Sigmund (1856-1939), et le judaïsme

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Emile Malet[1] est un journaliste ouvert sur de nombreuses thématiques dont celle du développement durable pour laquelle il a organisé de nombreux forums et qu’il traite aussi dans la revue Passages qu’il a créée, en 1987. Mais il est aussi concerné par le judaïsme en dehors de la religion, à l’image de Freud à qui il consacre son livre, qui a fait l’objet d’un colloque à Jérusalem lors de sa publication en septembre 2016.

Ce livre court, qui se lit facilement sur des sujets complexes, présente la relation de Freud au judaïsme en mettant bien en évidence les options prises par l’inventeur de la psychanalyse. Il s’agissait pour lui d’adopter une démarche purement scientifique, mais il admet que le fait qu’il soit juif n’est peut-être pas étranger à sa découverte. Il était juif, se reconnaissant comme tel, mais rejetait la religion qu’il considérait comme une illusion[2]. De même il avait tendance à rejeter le sionisme – quoique l’on trouve aussi des déclarations de sympathie pour ce projet – à cause du risque de dérive nationaliste qu’il constatait à l’époque (et qui trouve des échos actuellement).

C’est pourquoi, nous dit Emile Malet, Freud a consacré son dernier ouvrage Moïse et le monothéisme (paru en 1938) à déconstruire le mythe du chef hébreu pour donner un autre sens au personnage : « en faisant de Moise un prophète étranger (car égyptien) le roman historique de Freud adresse un pied de nez à l’intégrisme religieux et totalitaire dont se pare tout nationalisme ».

Mais quelle est cette identité juive qui peut se situer sans ou en dehors de la religion ? Le livre cherche à cerner cette réalité en donnant quelques clefs tirées des écrits de Freud, dont beaucoup de correspondances très riches complétant ses livres. Sont ainsi évoqués dans différents courts chapitres : un destin de civilisation à accomplir ; un identifiant juif inclusif ; le choix de Dieu pour Israël ; l’essentiel comme spécificité juive ; Moïse et les progrès dans la spiritualité ; Freud et le questionnement sioniste ; contre le nationalisme ; les génies juifs de langue allemande ; une pulsion de vie toujours en éveil.

Mais finalement Freud lui-même admet la difficulté d’une définition et il évoque, de façon fort peu scientifique, ce qui est paradoxal, « d’obscures forces émotionnelles… ainsi que la claire conscience d’une identité intérieure, le mystère d’une même construction psychique ».

Les thèses de Freud sur Moïse et la religion n’ont pas été bien reçues par les milieux juifs comme par les milieux chrétiens, mais c’est sans doute la question du sionisme réinterprétée et défendue par l’auteur dans la réalité d’aujourd’hui qui peut être la plus polémique de notre point de vue.

Le livre comporte également une série de citations qui éclairent les thèmes traités et il bénéficie d’une préface d’Avraham Yehoshua[3],  qui s’interroge sur la question de l’identité juive et écrit qu’elle « sera résolue le jour où la nationalité juive… sera disposée à reconnaître les Israéliens chrétiens ou musulmans comme membres du peuple d’Israël historique »

Xavier Godard

[1] Emile Malet était l’invité de l’émission Dialogue, sur RCF : Le judaïsme de Freud, une fidélité assumée :

https://rcf.fr/culture/philosophie/le-judaisme-de-freud-une-fidelite-assumee , le 16/12/2016 (durée : 25 mn).

[2] Cf. L’avenir d’une illusion / Sigmund Freud (1927) : https://www.editionsducerf.fr/librairie/livre/8652/l-avenir-d-une-illusion

[3] Avraham Yehoshua, couronné par le Prix Médicis 2012 pour son livre Rétrospective est l’un des chefs de file de la littérature israélienne contemporaine : https://www.babelio.com/auteur/Avraham-B-Yehoshua/141164