Titre

Islam de France, L’an I

Sous titre

Il est temps d’entrer dans le XXIème siècle

Auteur

Mohamed Bajrafil

Type

livre

Editeur

Paris : Plein Jour, 2016

Nombre de pages

148 p.

Prix

16 €

Date de publication

5 novembre 2017

Islam de France, L’an I

 

 

Avec Islam de France, l’an I, c’est le manifeste d’un engagement dans la cité, sachant allier intelligence et foi, responsabilité sociale et respect de la République, que nous propose Mohamed Bajrafil[1]. Universitaire français, de confession musulmane, il se réclame d’un islam universel parce que fraternel, laïc et républicain. A travers quatre chapitres, s’adressant aussi bien aux musulmans qu’aux non musulmans, il alterne une présentation de l’islam et un diagnostic sur l’action à conduire, pour le réconcilier avec ses buts spirituels et éthiques, dans le contexte d’une société moderne et laïque.

L’ « islam de France » auquel il aspire n’aura à renoncer à rien de ce qui le constitue, et s’intègrera à la République sans qu’elle ait à renoncer à elle-même. Car « l’islam n’est pas une culture : il peut les accueillir toutes » (p.110). Fin connaisseur de la tradition philosophique et juridique musulmane, Mohamed Bajrafil invite les musulmans à reprendre à leur compte, avec liberté et fécondité, le travail d’interprétation des textes faits dans les premiers siècles de l’islam. On renie les penseurs des siècles passés quand on les sacralise, affirme-t-il. En ajoutant qu’il faut renoncer aux épistémologies guerrières des siècles passés et « arracher le Coran aux mains des criminels » (p.30).  Car le Dieu du Coran est « un Dieu de miséricorde et de paix », et, comme toute religion, l’islam doit nous apprendre « à assécher en nous les sources de la violence ».

Ce regard courageux et lucide qu’il porte sur la religion musulmane se double d’une vision résolument optimiste de notre société. « La France est un pays où il fait bon vivre » affirme-t-il à ceux qui partagent sa foi. Et il n’hésite pas à ajouter qu’aujourd’hui ce pays « réalise beaucoup mieux la chari’a que bien des pays musulmans » (p. 46). Et cela parce que l’esprit de la chari’a n’est pas une codification juridique intemporelle, mais la volonté de garantir aux hommes les conditions de leur épanouissement, comme individus et comme société, dans leur relations entre eux, avec le monde, et avec leur créateur. Dans la conception qu’il développe, « l’islam est laïque par essence » (p.88), il doit valoriser la diversité et la différence comme source de liberté et d’enrichissement mutuel.

C’est un islam d’autonomie de pensée et d’indépendance d’esprit qu’il propose donc, contre tous les enfermements dogmatiques et les pouvoirs religieux. Mais pour Mohamed Bajrafil, la démarche spirituelle est inséparable d’un engagement dans la cité : l’action sociale, associative, éducative, et l’engagement pour l’équité doivent permettre le développement et l’épanouissement des talents de tous, dans le respect de leur diversité. Les ingrédients d’une société harmonieuse sont déjà là, dans notre pays, affirme-t-il. A nous de les mettre en œuvre, avec un esprit libre et inventif.

Ecrit au lendemain des événements de novembre 2015, ce livre n’a rien perdu de sa vigueur ni de son actualité[2]. Par son argumentaire solidement étayé en faveur d’un islam de liberté, ouvert à la connaissance et à l’estime de  l’autre différent, par son invitation à agir dans la société, c’est un message de confiance en l’homme et d’espoir pour la fraternité.

Bertrand Wallon

[1] Né aux Comores en 1978, Mohamed Bajrafil est docteur en linguistique, enseignant à l’université de Paris XII, et exerce comme imam à Ivry sur Seine. Il est un des fondateurs du Conseil théologique musulman de France, qui a pour vocation de proposer des avis aux musulmans de France pour leur permettre de vivre pleinement à la fois leur religion et leur citoyenneté.

 

[2] Cf.  Revue de presse sur le site de l’éditeur et Lire aussi le livre de Didier Leschi.-Misère(s) de l’islam de France.- Cerf, 2017 qui, d’après sa recension par Christophe Roucou dans Etudes d’octobre 2017, est « un appel qui rejoint celui de Mohamed Bajrafil (Islam de France, l’An I, Plein jour, 2015). Puisse cet appel être entendu par beaucoup. Il y a urgence.