Titre
Israël/PalestineSous titre
la défaite du vainqueurAuteur
Jean-Paul ChagnollaudType
livreEditeur
Sindbad-Actes Sud, mai 2017Collection
La bibliothèque arabe. L’ActuelNombre de pages
146 pagesPrix
14,50 €Date de publication
9 septembre 2017Israël/Palestine, la défaite du vainqueur
L’auteur[1] connaît remarquablement bien le contexte historique et politique d’Israël / Palestine. Il s’appuie sur une documentation variée, riche, diverse, tant sur le plan littéraire, qu’historique, et politique ; il cite souvent le quotidien Haaretz ainsi que certains médias français. Il évoque les différents conflits : depuis 1947, L’événement majeur pour lui est la Guerre des Six Jours provoquant « L’hostilité à l’égard d’Israël qu’expriment les fameux trois « non » du sommet de la Ligue arabe réuni à Khartoum en août 1967 : Non à la paix, Non à la reconnaissance d’Israël, Non aux négociations (p.17).
En 1979, l’Egypte signe un accord de paix avec Israël, mettant fin aux conflits des « Etats arabes » contre Israël et laissant les Palestiniens comme seuls opposants. Et les conflits se poursuivent : invasion du Liban en 1982 ; répression des Intifadas en 1987, 2000 ; guerre contre le Hezbollah en 2006 ; guerres contre Gaza : 2008 / 2012 et 2014. Pour l’auteur, un basculement a lieu en 1982, on passe du conflit israélo-arabe au conflit israélo-palestinien.
Le nœud de l’ouvrage, pour moi, c’est la question de l’identité de l’Israélien et du Palestinien
L’Israélien est avant tout un soldat, façonné par la mémoire de la Shoah indissociablement liée à l’histoire du pays. La politique du pays ne se comprend qu’à la lumière du poids écrasant de la Shoah dans la mémoire collective. Personne ne peut s’y soustraire. L’évocation de la Shoah est partout. Yad Vashem[2] est le passage obligé pour les enfants, les scolaires, les collégiens, les lycéens, puis pour l’armée, rappel de l’histoire, et peur de l’avenir : « c’est arrivé hier, cela peut arriver demain » (p.85). De nombreux Israéliens se voient et se vivent dès lors comme des victimes. Les dirigeants les plus nationalistes n’hésitent pas à instrumentaliser cette dimension de victimes.
Le Palestinien en tant que personne n’existe pas. Il est un ennemi, un terroriste, il n’est pas un vis à vis reconnu et accepté. Il est celui que l’on combat, contre qui on lutte, que l’on veut et doit éliminer. Il n’est pas respectable car il ne défend pas une cause, « en dernière instance, ce n’est pas un être humain. Le fait de tuer un terroriste devient un acte nécessaire et légitime qui ne doit pas être considéré comme une atteinte à la vie humaine ». (p.25)
Le drame des Palestiniens qui renforce le comportement des Israéliens à leur égard est leur division voire leur désordre politique, idéologique et territorial. D’un côté le Hamas qui semble se cramponner à son pouvoir à Gaza, de l’autre le Fatah incapable de créer une unité nationale, sans parler de Mahmoud Abbas qui s’accroche à son pouvoir, refusant des élections, alors que les mandats ont expiré depuis longtemps.
A partir de cette vision des deux peuples qui s’affrontent, l’auteur s’attardent sur les attentats et les assassinats ciblés et montre que le camp de la paix en Israël s’est retrouvé sans voix ce qui provoqua un véritable repli sur soi de la société israélienne
Occuper Jérusalem-Est est un objectif. Israélien. De nombreuses colonies voient le jour pour encercler la ville, c’est la violation du droit international, mais Israël n’entend pas ! L’enjeu demeure la vieille ville, elle aussi de plus en plus occupée, et tout est fait pour dégoûter les Palestiniens de Jérusalem de rester à Jérusalem.
Pour conclure : Jean-Paul Chagnollaud est conscient que ce conflit risque de durer encore longtemps. Israël semble être le vainqueur de la situation.
Mais parce qu’Israël domine par la force, par l’occupation, la colonisation, on ne peut pas parler de victoire, car la vraie victoire est celle qui instaure la paix durable, et cela n’est possible que par le droit.
Aujourd’hui, on est dans une impasse diplomatique, Oslo est un échec et on a tourné le dos à une solution à deux Etats.
Martine Millet
[1] Jean-Paul Chagnollaud, professeur émérite des universités, président de l’institut de Recherche et d’études Méditerranée Moyen-Orient (iReMMO) et de la revue Confluences Méditerranée, est l’auteur ou le co-auteur de plusieurs ouvrages sur le Moyen-Orient, et notamment sur la question palestinienne, dont, en collaboration avec Pierre Blanc, L’Atlas du Moyen-Orient : aux racines de la violence.- Autrement, 2016 ; et L’Invention tragique du Moyen-Orient.- Autrement, 2017.
J.-Paul Chagnollaud, était, le 06/06/2017, l’invité de La Grande table (2ème partie), sur France-Culture pour les 50 ans de de la Guerre des six jours. Ecouter cette émission (durée : 34 mn) : Eternelle guerre des six jours
Il était aussi, le 26/07/2017, l’invité, avec Agnès Levallois, de l’émission Les Matins d’été, sur France-Culture, à propos de la « crise des portiques » à Jérusalem, en juillet 2017. Ecouter cette émission : 1ère partie : Crise des portiques (durée : 22 mn), 2ème partie : Crise des portiques à Jérusalem : un apaisement est-il possible ? (durée : 15 mn).