Titre
JérusalemSous titre
Un essai photographiqueAuteur
Altair AlcântaraType
livreEditeur
Paris : Hémisphères éditions : Maisonneuve & Larose nouvelles éditions, juillet 2021Nombre de pages
160 p.Prix
28 €Date de publication
15 juillet 2022Jérusalem, un essai photographique.
A la réception de ce livre, un soupir de lassitude : encore un livre sur Jérusalem ! Et une interrogation : que pouvait-on dire de plus sur la “ville trois fois sainte” ? Dix mille fois décrite et photographiée sous toutes les coutures depuis des années, avec les sempiternelles clichés, les mêmes formules récurrentes, les mêmes redondances, et les mêmes photos : les musulmans au dôme du rocher, le juif en prière le front collé au mur des pleurs, sans oublier la procession chrétienne sur la Via Dolorosa chaque année à Pâques.
Tous ces attendus, Altair Alcântara, nom d’emprunt d’un photoreporter qui a exposé dans le monde entier, aura su les éviter, pour nous offrir une Jérusalem différente. En quelque soixante photos accompagnées de textes qui tranchent avec ces légendes habituelles, reproduisant en mots les images exposées, le livre d’Alcântara nous fait ressentir avec force la spiritualité de la ville mais aussi sa violence. Et pas uniquement avec des pierres et des lieux saints – et c’est là toute son originalité -, mais avec des visages d’hommes et de femmes qui sont de notre temps. Des pages qui ne racontent pas seulement les symboles et le passé d’une cité pas comme les autres, mais la vie d’aujourd’hui, mélangeant la brutalité à la douceur, la foi à la violence des armes, soulignant aussi son universalité, avec ses langues venues du monde entier.
Des images surprenantes comme cette séquence, où des jeunes religieux juifs en kippas dansent, stimulés par un groupe de femmes palestiniennes en hidjab, frappant dans leurs mains. Scène d’espoir d’une coexistence possible dans cette région du monde, qui compte tant de drames et de morts depuis 2000 ans. Plus loin, ces femmes en noir, israéliennes, qui chaque vendredi, vers midi, manifestent contre l’occupation des territoires palestiniens par l’armée israélienne, sourdes aux insultes que leur lancent les colons de passage.
D’autres images évoquent la répression dont sont victimes les Palestiniens. Ici, une jeune femme étranglée par deux policières israéliennes. Là, un berger âgé et son troupeau devant le mur de séparation qui confine les Palestiniens dans leur pauvreté.
Et puis la foi omniprésente : foi des chrétiens éthiopiens dans leur église, des juifs devant le Mur des lamentations, et des musulmans, près de la mosquée Al-Aqsa.
Un quotidien sur pellicule accompagné par des textes truffés d’anecdotes inédites, amenant le lecteur à découvrir Jérusalem autrement que figée dans les monuments sacrés. Une cité sainte aussi vivante que cette mosquée/chapelle de l’Ascension située au sommet du Mont des Oliviers, lieu musulman accessible aux chrétiens, où reposerait la mystique irakienne du VIIe siècle, Rabbia Al Adawiyya, qui demandait à Dieu de détruire le paradis par le feu, et de noyer l’enfer sous des trombes d’eau, pour aimer sans espérer le premier, ni craindre le second.
La Jérusalem de 2022 n’est plus celle de 20171 et encore moins celle de 1948. L’auteur en tient compte, et son livre prend le lecteur par la main pour l’emmener dans une ville ancrée dans le présent, en lui donnant l’envie d’y aller ou d’y retourner.
Administrateur de CDM
1 2017 ! Pourquoi ? Parce que l’élection de Donald Trump à la présidence des États-Unis a bouleversé l’état d’esprit et l’espace de la ville.