Le Moyen-Orient en cartes

Le Groupe La Vie-Le Monde publie un nouveau numéro hors-série consacré au “Moyen-Orient en cartes“ dans le cadre d’une série réalisée depuis plusieurs années, selon le même concept à propos des sujets les plus divers.¹

Partant du constat que cet Orient – “Proche“ ou “Moyen“ – est en lien constant avec l’Occident, et particulièrement l’Europe², cette publication se propose de comprendre “ce qui se joue au Levant et au-delà“, en prenant pour guide des cartes afin de décrypter un passé complexe et comprendre une réalité contemporaine qui ne l’est pas moins.³

Pour tenter d’appréhender cette complexité, 66 contributeurs ont été sollicités, 57 sujets ont été retenus et, après une introduction intitulée Cartes d’identité, répartis en 4 chapitres : Les mondes anciens – Une terre d’Islam – L’ingérence européenne – Essor et soubresauts des Etats-Nations.

Chacun d’eux – depuis les flux migratoires jusqu’à la guerre civile libyenne, en passant par des questions aussi diverses que L’Empire néo-assyrien, Le califat abbasside, Les Séfévides ou, plus près de notre époque, Les printemps citoyens ou La guerre civile syrienne -, est traité sous la forme d’une fiche de deux pages au maximum comportant chacune différentes cartes riches d’indications et de références et accompagnées de courts textes de présentation et d’analyse du thème abordé.

Cartes et textes sont issus des collections L’Atlas et L’Histoire coéditées par La Vie et Le Monde depuis plus de dix ans et ont été agencés sous la direction de Chantal Cabé pour répondre aux objectifs spécifiques de cette publication.

Les représentations cartographiques ont non seulement un intérêt considérable pour appréhender les questions géopolitiques parce qu’elles mettent en évidence des situations, des interactions, des proximités qui n’apparaissaient que de manière diffuse, mais aussi parce qu’elles provoquent le rêve, nourrissent l’imaginaire en donnant à contempler des espaces qu’on croit pouvoir parcourir facilement, façonner ou remodeler.⁴

L’étude de ces cartes – figurant les évolutions nées des interactions et souvent des violents affrontements auxquels les civilisations successives, ces bêtes féroces dont parlait Braudel, se sont livrées pendant plusieurs millénaires -, met en évidence les métissages qui se sont créés non seulement dans la région, mais aussi au-delà avec l’Occident d’une part et l’Extrême- Orient d’autre part. C’est d’ailleurs précisément ce que souligne Henry Laurens dans l’introduction à cette publication.⁵

Inutile de souligner à quel point le rappel des liens millénaires qui se sont constitués dans cette partie du monde, est essentiel à une époque où des nationalismes, qui apparaissent comme des anachronismes dangereux, se réveillent.

Voici donc un instrument précieux pour mieux appréhender une région complexe dont les contours mêmes ne sont pas définis de manière absolument certaine.⁶

Quelques clés essentielles pour comprendre notre actualité sont d’emblée mises en évidence. Ainsi est-il judicieusement rappelé que le Moyen-Orient possède la moitié des réserves de pétrole mondiales et le tiers des réserves de gaz⁷ et que l’islam prédomine largement dans cette grande diversité culturelle où les chrétiens occupent une part de plus en plus minoritaire.⁸

On pourra toutefois regretter que certaines cartes, trop chargées de références, soient d’un accès parfois ardu et que par ailleurs certaines savantes analyses soient trop détachées de leur contexte, et ne soient pleinement accessibles qu’aux spécialistes avertis, alors que l’approche d’autres thèmes laisse le lecteur sur sa faim.

Un rappel chronologique aurait aussi probablement été fort utile pour mieux appréhender les grandes évolutions de cette région qui sont traitées.

Sans doute cette publication est-elle davantage conçue comme un utile complément à d’autres travaux sur le thème du Moyen-Orient que comme une synthèse complète sur celui-ci.⁹

Elle demeure, cependant, un utile document pour ceux, nombreux, qui se passionnent pour le Moyen-Orient.¹⁰

Bernard Ughetto