Titre
Liban, les défis de la libertéSous titre
Le combat d’un chrétien d’OrientAuteur
Fouad Abou Nader ; avec Nathalie Duplan et Valérie Raulin ; postface de Gwendal RouillardType
livreEditeur
Paris : Ed. de L’Observatoire, 9 juin 2021Nombre de pages
224 p.Prix
19 €Date de publication
1 décembre 2021Liban, les défis de la liberté
Il aurait été plus juste d’intituler ce livre “Du combattant au militant du vivre ensemble”.
Il résume tellement mieux le parcours de l’auteur dans son Liban natal.
Petit-fils de Pierre Gemayel, fondateur du parti Kataëb, ancêtre de la milice chrétienne des Forces libanaises (FL), et neveu de Bachir et Amine Gemayel, tous deux présidents de la République libanaise1, Fouad Abou Nader, 65 ans, est un personnage incontournable de l’histoire de ce Pays.
Une vie qui se scinde en deux périodes : la première qui va de 1971 à 1990 retrace 20 ans de combat pour l’indépendance, puis, à partir de 1990, la seconde, et ses 30 ans de lutte pour la reconstruction du pays.
Il a 15 ans lorsque qu’il s’engage en 1971 dans le parti Kataëb, fondé par son grand-père en 1936, et 18 ans lorsqu’il prend les armes contre les Palestiniens, qui instaurent un “État dans l’État” au Liban. Il précise : “Si je défends la création d’un État palestinien en Palestine, je ne pouvais pas accepter que ce peuple, que nous avions accueilli dès 1948, impose sa volonté dans mon pays natal.”
Quinze ans de guerre où le jeune homme est blessé plusieurs fois. Quinze ans de violences et de destructions où il voit ses proches tomber, passant par les conflits et les trahisons dans son propre clan.
À ceux qui reprochent aux chrétiens d’avoir fait couler le sang, Fouad Abou Nader rétorque : “Si nous n’avions pas pris les armes en 1975, le Liban aurait été une patrie de rechange pour les Palestiniens, ou une nation annexée par la Syrie.”
S’il s’est battu pour maintenir une présence chrétienne sur sa terre natale, c’est aussi pour construire un vivre ensemble islamo-chrétien, et démontrer au monde entier, que l’on peut bâtir une citoyenneté commune avec des religions différentes.
La guerre terminée en 1990, Fouad Abou Nader dépose définitivement les armes. En 2010, il fonde Nawraj, une association qui aide les chrétiens à rester sur place, tout en maintenant un lien fort avec les communautés musulmanes, œuvrant pour construire cet “Etat-un” dont il rêve, avec “les ennemis d’hier”
Contrairement aux chrétiens identitaires, Fouad Abou Nader soutient qu’un Liban laïc est possible, à condition de ne pas rejeter la religion “comme vous le faites en France, mais en s’inspirant davantage du modèle italien”, dit-il.
En onze ans d’existence, Nawraj affiche à son actif un grand nombre de réalisations, grâce auxquelles les chrétiens sont restés sur leur terre : aides au développement et à l’agriculture, constructions ou restaurations d’écoles, créations de dispensaires, améliorations des services publics (eau, électricité, transports).
Outre la direction de son association, il est aussi appelé au Liban, mais également en Europe et aux États-Unis pour présenter Nawraj, et développer sa conception du vivre ensemble. Et quand on lui demande le pourquoi de cette métamorphose, il répond sans l’ombre d’une hésitation : “Je ne veux pas que mes enfants connaissent le drame que nous avons vécu.“2
Luc Balbont3
1 Bachir Gemayel, président du 23 août 1982 jusqu’à son assassinat le 14 septembre 1982 ; et Amine Gemayel, président de 1982 à 1988.
Notes de la rédaction :
2 A revoir, sur LCP : Liban : la révolution naît des entrailles du chagrin : documentaire / Sarah Claux, Charbel El-Cherif, Maxime Mace, Arthur Sarradin (France, 2021, durée 60 mn), diffusé, le 04/11/2021 et suivi d’un débat dont l’auteur de la postface du livre, Gwendal Rouillard – député LREM de la 5e circonscription du Morbihan et Membre de la commission de la défense nationale et des forces armées -, était l’un des invités de Jean-Pierre Gratien (durée 30 mn).
3 Né le 23 avril 1949, journaliste. Arabisant, Luc Balbont vit depuis 1989 entre la France et le Liban, pays où réside sa famille. En 40 ans de journalisme il a couvert une grande partie des événements et des bouleversements du monde arabe, de la guerre du Liban (1975-1990) aux révolutions arabes de 2011. Il a reçu en 2006 le prix “Reporter d’espoir” pour des reportages effectués en Égypte et en Palestine, et le prix littéraire de L’Œuvre d’Orient en 2012, pour le livre Jusqu’au bout.– Nouvelle Cité, 2012 : entretiens avec Mgr Casmoussa – alors archevêque syriaque catholique de Mossoul -, assurés avec Joseph Alichoran. Il est actuellement correspondant à Beyrouth pour le quotidien francophone algérien Liberté. Cf. Son blog sur le site de L’Œuvre d’Orient – où a d’abord été publiée cette recension, le 22/07/2021 et ses Regards et recensions de livres pour le site de CDM dont il est membre du CA.
De Luc Balbont, on lira aussi les recensions des trois livres écrits par Nathalie Duplan et Valérie Raulin, coautrices de Liban, les défis de la liberté / Fouad Abou Nader :
Le camp oublié de Dbayeh : Palestiniens chrétiens, refugiés à perpétuité.- Le Passeur, 2013 – Prix littéraire 2014 de L’Œuvre d’Orient ; Jocelyne Khoueiry l’indomptable.– Le Passeur, 2015 ; Un café à Beyrouth.- Magellan & Cie, 2018