Titre

Rachel et les siens

Sous titre

Roman

Auteur

Metin Arditi

Type

livre

Editeur

Paris : Grasset, 2020

Nombre de pages

503 p

Prix

24 €

Date de publication

16 juin 2021

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Rachel et les siens

Avant de présenter le roman publié par les éditions Grasset, il convient de rappeler qui en est l’auteur1, même si sa bibliographie comporte désormais 20 titres. Metin Arditi, écrivain, homme d’affaires et mécène passionné de musique, arrive en Suisse alors qu’il est encore enfant. Après des études de génie atomique à l’École polytechnique de Lausanne, il apprend le métier des affaires à l’Université de Stanford aux Etats-Unis. C’est lors de son retour à Genève qu’il fonde une société d’investissements immobiliers, avant de créer la Fondation Arditi et de présider l’Orchestre de la Suisse Romande. Il publie alors son premier roman en 1997.

Son roman Rachel et les siens parait à l’automne 2020 chez Grasset.

Ce roman plonge le lecteur dans le vingtième siècle depuis le 12 février 1917 – au moment où les troupes britanniques s’apprêtent à libérer Jérusalem du joug ottoman-, jusqu’au 28 septembre 1982. L’héroïne, Rachel Alkabes, meurt au crépuscule du siècle, pleinement consciente que le nouvel État d’Israël est construit sur une terre de fractures.

Juive et palestinienne, Rachel Alkabes écrit des pièces de théâtre qui, partout où elle réside, ont le mérite de provoquer le public : à Tel Aviv, Rabbi Seligman et les Perses, comme à Istanbul Le wagon pour Askale, ou à Paris, Le chemin de croix.

Ce livre commence comme une chronique historique mais c’est un roman haut en couleurs qui ne peut qu’émouvoir et troubler les certitudes du lecteur.

Le retour sur l’histoire agitée du Proche-Orient souligne combien la vie des nations contemporaines était déjà “mondialisée”. L’arrivée des puissances occidentales, France et Grande-Bretagne2, dans l’Est méditerranéen n’avait rien de rassurant. Plus tard, l’entente du pouvoir turc avec l’Axe Berlin-Rome a nourri les hostilités contre les minorités arméniennes, juives, et grecques. Aujourd’hui, que peut-on raisonnablement attendre du rapport de forces en place dans les collines de Judée ? “Pouvons-nous construire notre bonheur sur le malheur d’autrui ?” (p.163).

L’itinérance de Rachel Alkabes interroge aussi le lecteur. Contrainte de fuir sa maison natale de Jaffa, elle est hébergée au kibboutz de Do Beitenou, puis s’installe à Tel Aviv. Veuve de son compagnon Karl Katzenbach puis mariée à un riche coreligionnaire, marchand de tissus, elle le suit à Istanbul. Là, elle fait la rencontre du consul général de France. Puis, veuve une seconde fois, elle continue son parcours de scénariste à Paris. La pièce de théâtre qu’elle réussit à faire jouer est aussi son drame : aimer c’est accepter de vivre dangereusement en sachant que l’amitié n’est jamais à l’abri d’une trahison. Quel que soit le contexte, il ne sert à rien de cacher la vérité car elle finit par se révéler.

“Ma mère avait un mot que je n’ai jamais oublié. Il est vrai qu’elle me l’a répété si souvent… Elle me disait : la vérité finit toujours par avoir trop chaud. Et qu’est-ce que tu fais quand tu as trop chaud ? Tu enlèves tes vêtements ! Et si tu as beaucoup trop chaud, tu te mets à nu. C’est ce que fait la vérité. Elle finit toujours par se mettre à nu.” (pp. 140-141)

Marc Ameil

Adhérent de CDM

Notes de la rédaction

1 Metin Arditi était le grand témoin de l’émission 28 mn sur Arte, le 28/10/2020 : (durée : 11 mn)