Titre
S’ils se taisent, les pierres crieront… Sous-titre : Auteur(s) : Type : Livre Editeur :Sous titre
Trois mois en Palestine au service de la paixAuteur
Corinne et Laurent MérerType
livreEditeur
Balland, 07/09/2017Nombre de pages
168 p.Prix
15 €Date de publication
1 mars 2018S’ils se taisent, les pierres crieront…
L’interminable conflit israélo-palestinien met à vif les sensibilités des protagonistes et de tous ceux qui s’y intéressent, au point qu’il est aujourd’hui devenu difficile d’en parler sans être très vite taxé d’antisémitisme par les uns ou de soutiens du terrorisme par les autres. L’intérêt principal de l’ouvrage que nous offrent Corinne et Laurent Mérer est qu’il repose sur un témoignage vécu au plus près de la réalité.
Cet ancien officier de marine et son épouse enseignante ont, en effet, choisi de donner trois mois de leur temps pour se mettre au service d’un programme mis en place par le Conseil œcuménique des Eglises qui envoie chaque année des observateurs sur le terrain pour « accompagner les Palestiniens – chrétiens et musulmans – et les Israéliens dans leurs actions non violentes et leurs efforts concertés en vue de mettre fin à l’occupation ».
Les équipes internationales de l’EAPPI (Ecumenical Accompaniment Programme in Palestine and Israël [1]) ne cherchent pas à dire qui a tort ou raison. Ils observent, rapportent, encouragent, et sont ainsi en mesurer de témoigner que, au-delà d’injustices criantes et d’indéniables actes de violence, il y a des hommes et des femmes, des deux côtés, qui « ne veulent pas haïr ». C’est précisément un des défis de la vie dans l’actuelle Terre sainte, tant la situation est polarisée et, à vues humaines, sans issue.
Au fil de deux douzaines de petits chapitres, l’ouvrage nous décrit ainsi le quotidien des travailleurs palestiniens qui doivent passer les checkpoints de l’armée israélienne pour aller à leur travail, l’humiliation qui leur est souvent infligée quel que soit leur âge. Ils témoignent de ce que l’on sait déjà : l’occupation des terres par des colons souvent violents, la destruction de maisons et d’écoles, l’emprisonnement de jeunes adolescents, les interdits de circulation y compris pour aller prier à Jérusalem.
Mais ils nous montrent aussi le désarroi et même la peur de ces jeunes soldats israéliens, qui partent tous au service militaire, garçons et filles, à l’âge de 18 ans, avec une préparation psychologique qui diabolise l’autre et les conduit à tirer plus vite et plus souvent qu’il ne faudrait. On devine le dégât moral fait à cette jeunesse qui, jouissant d’une impunité quasi totale, est parfois amenée à tuer ou à invalider pour la vie des jeunes lanceurs de pierre.
Le bilan de ces trois mois d’observation au ras du terrain, jour et nuit, à la lisière des villes et dans les campements bédouins, est accablant, et pourtant les auteurs ne cherchent pas à prendre parti. Ils nous montrent la réalité et les possibles chemins pour en sortir. « Changer les esprits, apprendre à ne pas haïr », dit le jeune Ismaïl, infirmier à Bethléem ; « affronter la vérité sur les abus, les exactions et les destructions à l’égard des Palestiniens qui sont leur lot quotidien », déclare Breaking the silence, une Association de militaires israéliens qui s’oppose à la violence commise par l’armée[2].
Une issue pacifique et juste semble de plus en plus hors de portée et ces partisans de la paix, des deux bords, risquent de se décourager. Et pourtant, il n’y a de véritable avenir pacifique possible pour les uns et les autres que si le droit et la justice retrouvent un jour leur place.
La sacralisation de la terre[3] confère hélas une dimension idéologique redoutable qui conduit à réécrire l’histoire (que fut en réalité l’épopée de Josué) et empêche de penser le présent.
Après un livre comme celui de Corinne et Laurent Mérer[4], personne ne pourra dire que « nous ne savions pas ». C’est à la communauté internationale d’avoir aujourd’hui le courage d’imposer une négociation qui mette fin à un conflit dont elle est en partie responsable.
Nous pourrions y penser davantage en cette année centenaire de la Déclaration Balfour[5].
Un ami de Chrétiens de la Méditerranée
[1] Cliquer ici : pour en savoir plus sur l’EAPPI
[2] Cf. Site de Breaking the silence et wikipedia.org
[3] Cf. La terre, la Bible et l’histoire / Alain Marchadour, David Neuhaus.
[5] Cent ans après, les Palestiniens demandent réparation cf. RFI, 02/11/2017