Messages de Noël 2010

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Dans les premiers siècles du christianisme, surtout au temps des persécutions, les Églises locales échangeaient des messages fraternels, en particulier à Noël et à Pâques. Au fil du temps, cette coutume ne s’est jamais complètement perdue. Elle a néanmoins bien besoin d’être revitalisée car elle manifeste très heureusement la dimension horizontale de l’Église, son universalité qui est, au sens propre du mot, sa véritable catholicité par delà sa diversité et ses divisions confessionnelles.

Le réseau Chrétiens de la Méditerranée a vocation à s’étendre tout autour de cette mer pour tisser de manière oecuménique les liens entre Églises, tout en dialoguant au service de la paix avec ceux qui ne partagent pas notre foi – en particulier les musulmans et les juifs qui croient au même Dieu unique.

C’est dans cet esprit que des amis vivant dans tout le grand bassin méditerranéen nous ont fait parvenir  des messages fraternels de Noël adressés à tous leurs frères chrétiens. Nous les publions ci-dessous dans l’ordre où nous les avons reçus, sans souci de préséance.

 A.S.

Derniers messages reçus :

 

 

De EL ALAOUI TALIBI Moulay El Hassan,

Aumônier National Musulman des Prisons.

 

Chers amis,

 

Il y a quelques jours, en répondant à l’enseignant de mon fils qui s’étonnait que l’on ne fêtait pas Noël, je me suis rappelé que cette même question m’a été posée par mes aînés : « C’est quoi Noël, pour nous qui sommes musulmans ? Pourquoi on ne le fêterait pas ? ». Je me souviens que, spontanément, j’avais répondu que pour un musulman, vivre Noël c’est comme être invité à l’anniversaire d’un ami ou d’un copain. Ce jour-là, c’est sa date de naissance, c’est un jour exceptionnel pour lui. Il reçoit des cadeaux et il a un beau gâteau. Pour l’invité, ce n’est pas son jour de naissance, il ne reçoit pas de cadeaux, mais alors qu’il mange une part de ce beau gâteau, il est très heureux. En fait, il est heureux d’être invité, heureux de ramener son cadeau et de vivre cette belle après-midi, qu’il quittera avec plein de souvenirs, avec l’espoir de revenir l’année prochaine. Alors, heureuse naissance vers des moments meilleurs, vers un monde de partage et d’amour pour nos soeurs et frères chrétiens, dans tous les coins du monde. Nous sommes heureux d’assister à ces instants de bonheur partagés.Avec toute notre amitié!

Samia, Hassan et leurs enfants.

 

De Bernard JANICOT, prêtre à Oran en Algérie.

 

Ici aussi, la fête se prépare

 

Ici aussi, la Fête se prépare, chez les chrétiens, mais dans une ambiance bien différente de celle qui règne en France. Pas de neige… et même du beau temps jusqu’à hier… Aujourd’hui, le grand vent chasse quelques nuages, et la température s’est un peu rafraîchie : seulement 15° ! La mer est complètement démontée, et les papiers, sacs plastiques, rivalisent avec les pigeons et les mouettes.

Demain soir, ce sera donc la Fête, avec la Messe de Minuit célébrée chez les Petites Sœurs des Pauvres d’Oran, grande maison où elles hébergent une bonne cinquantaine de personnes âgées, souvent sans famille, et sans revenus. Elles accueillent chaque année la communauté chrétienne pour cette Eucharistie de la Nuit aux couleurs africaines, dans une chapelle brusquement trop petite pour recevoir ceux et celles qui s’y pressent.

Le 25, la messe sera célébrée dans la toute nouvelle cathédrale, complètement rénovée, du Centre Diocésain de Saint-Eugène. Lieu resté simple, mais devenu beau, priant, clair. Pas de dinde ni de foie gras pour le repas qui suivra, mais un grand couscous partagé en communauté. Combien serons-nous ? Une bonne centaine sûrement, et probablement beaucoup plus. Migrants et étudiants d’Afrique Sub-saharienne, personnes âgées de la ville, religieux et religieuses…

Un Noël qui passera complètement inaperçu du reste de la ville, où la vie continue normalement, comme si de rien n’était. Une ville sans décoration, sans guirlandes, sans vitrines surchargées de chocolats et de spiritueux… Faut-il vraiment s’en plaindre ? N’est-ce pas aussi une manière pour nous de redécouvrir Noël plus par le cœur, plus par l’essentiel ? Cela gâche t-il la Fête ou la rend-elle plus authentique dans son dépouillement et sa fraternité ?

 

Et puis aussi, BONNE NOUVELLE ANNÉE ; et oui !

 

Nous le répétons chaque année, en nous efforçant d’y croire ! Mais en sachant aussi que cette année, elle sera pour une grande part ce que nous en ferons, les uns et les autres. Ce que nos « dirigeants » en feront.

Bonne Année au peuple de Palestine et de Gaza ! Bonne Année au peuple de Côte d’Ivoire, de Centrafrique, du Soudan !

Bonne Année à ceux et celles qui sont les laissés-pour-compte de tant de nos sociétés !

Bonne Année à ceux et celles qui savent ouvrir les yeux pour voir, les mains pour soutenir, et éventuellement leur portefeuille pour aider.

Sinon, ici, la vie continue normalement, avec ses bons jours, et parfois, ceux qui sont un peu plus difficiles. Mais, sincèrement, les bons sont les plus nombreux. Ce sont ceux où il est permis de vivre de vrais moments d’amitié, de rencontre dans la bibliothèque. Ce sont ceux où l’on termine la journée en disant « Merci mon Dieu », pour tout ce que je viens de vivre… Pas des grandes choses la plupart du temps ; non, un regard, une poignée de main, un sourire, quelques échanges. Une jeune abonnée qui vient de soutenir son doctorat et qui arrive les bras plein de gâteaux et de sodas. Ce jeune étudiant en master de droit, non-voyant, et qui s’excuse presque d’être obligé de se faire aider par quelqu’un qui lui prête ses yeux pour lui lire les bouquins dont il a besoin. Cette autre, en chaise roulante, gênée parce qu’elle ne peut attraper seule les livres…et qui nous gratifie de tellement de sourires. Ces personnes rencontrées en ville, anciens abonnés, qui nous demandent des nouvelles des uns et des autres… La liste pourrait encore s’allonger.

C’est aussi cette rencontre, le week-end dernier avec un jeune homme d’une ville de l’intérieur du pays qui essaie de prendre en charge une opération très lourde que doit subir une toute petite fille, née avec une malformation cardiaque… et qui me disait : c’est normal ; ça n’arrive pas qu’aux autres, ce pourrait être un de mes enfants. Sur son site internet, cette citation dont il connaît bien la source « Celui qui donne sa vie pour les autres, il la reçoit… »

C’est encore cette promenade, avant-hier – un jour qui ressemblait encore à l’été – , avec un jeune étudiant, au cours de laquelle plein de sujets ont été abordés, études, avenir, travail, chômage, copines : tout ce qui fait la vie d’un jeune de son âge.

Ce soir, pour en terminer là, je reçois deux amis de très longues dates, avec lesquels depuis plusieurs années, nous poursuivons un échange personnel, humain, spirituel… Parfois presque une révision de vie…

« Je partage le pain et le sel », aimait à dire le Père de Beaurecueil à ceux qui l’interrogeaient, jadis, sur sa vie en Afghanistan…

Je ne sais comment je pourrais traduire cela pour moi, ici, en Algérie, avec tous ses amis musulmans dont je viens de parler. Je partage ces moments d’amitié, de rencontre, d’échanges, de conseil. Avec les années, je suis devenu comme un « sage », un « oncle » comme on aime à le dire… parfois même un « hadj », même si je n’ai pas fait, bien sûr, le pèlerinage à La Mecque !!!

Voilà quelques impressions que j’avais envie de partager au seuil de la Nouvelle Année. Les « informations », bonnes ou mauvaises, vous les avez par les médias. Je préférais laisser parler un peu mon cœur.

 

Très Bonne Année à Tous et à Toutes.

 

 

* * * * * * * * *

 

Du Père Henri Teissier, ancien archevêque d’Alger, résidant toujours en Algérie.

 

La mémoire des frères de Tibhérine

 

La fête de Noël me donne l’occasion de rejoindre par votre site votre réseau de « Chrétiens de la Méditerranée ». Je voudrais en particulier remercier les chrétiens de la rive nord de la Méditerranée pour l’accueil émouvant fait au film sur les frères de  Tibhérine. A travers eux, le message de toutes nos autres victimes de la crise algérienne et celui de nos communautés actuelles a rejoint beaucoup d’hommes de bonne volonté en Europe. Ce film aura fait connaître notre vocation au Maghreb : être l’Église de nations qui sont musulmanes et qui nous accueillent.

 

De Martine Millet, pasteur de l’Église réformée de France, ancienne

accompagnatrice oecuménique en Palestine :

 

L’audace de traverser la nuit du monde

 

Une de mes amies palestiniennes chrétiennes était en France la semaine dernière. Elle est allée à Strasbourg, Mulhouse et Paris, au moment où les marchés de Noël s’installaient, décoraient leurs petits chalet…  Elle regardait étonnée : « Mais où est Noël ? »  disait-elle.  Non, ce n’est pas ça Noël ! C’est avec elle et en Palestine que j’ai pris conscience que ce temps de l’Avent et la fête de Noël nous appellent à un combat, aujourd’hui, comme hier.

D’un côté l’occupation, les humiliations, les vexations et les offenses ; de l’autre la naissance d’un enfant, dans une étable.

D’un côté la force, les ordres, les cris ; de l’autre la voix des anges qui annonce « Gloire à Dieu dans les cieux et Paix sur la terre parmi les hommes de bonne volonté »

D’un côté les oliviers que l’on brûle, les maisons que l’on démolit, le mur que l’on construit ; de l’autre : « Ne crains pas, Joseph… Tu lui donneras le nom de Jésus, c’est lui qui sauvera son peuple de ses péchés ».

Et ceci est vrai du temps de César et de Hérode comme aujourd’hui en Palestine occupée par l’armée israélienne.

Ce temps de l’Avent, c’est une résistance à toute facilité, c’est l’audace de traverser la nuit du monde, c’est le cri de Stéphane Hessel « indignez-vous ! ». Mais c’est aussi une invitation au silence et à la prière. Le nouveau-né couché dans sa crèche sera l’homme allongé dans la mort qui fera rouler la pierre de nos tombeaux.

Entre deux, il y a une humanité de paix, de justice, d’amour à créer, c’est là, notre appel et notre mission.

 

Du Père Michel Kubler, assomptionniste, directeur du Centre Saint Pierre-Saint André de Bucarest

 

Soyons des « pontifes »

 Établi depuis trois mois maintenant en Roumanie, je suis frappé par l’importance que ce pays – et son peuple, et ses Églises – attache très visiblement au fait d’être situé au carrefour de l’Orient et de l’Occident : terre latine au milieu d’un océan slave, il met volontiers en avant sa mission de communication entre les deux « poumons » de l’Europe, voire du christianisme – pour reprendre l’image du poète russe Viacheslav Ivanov, souvent reprise par Jean-Paul II. Et il est bien sûr que cette vocation roumaine se trouve ainsi fondée. Savoir comment et jusqu’à quel point elle parvient à l’assumer est sans doute une autre question, qui vaut d’ailleurs pour toute collectivité affichant légitimement une aussi haute ambition.

Ma surprise, depuis que je vis et œuvre en contrées orientales, est de voir combien d’autres peuples de la région, particulièrement dans l’espace méditerranéen, se reconnaissent un rôle analogue : porteurs d’une diversité de cultures, héritiers d’une histoire qui a mêlé leurs gènes à d’autres, à priori fort étrangers, riches d’une tradition de dialogue en leur sein comme avec leurs voisins, ils s’honorent – variablement selon les discours, mais sur fond d’une rhétorique finalement homogène – d’être un « carrefour de civilisations », de se trouver au « croisement des cultures », de constituer une « mosaïque de traditions », un « arc-en-ciel de confessions ». Autant de professions de foi qui forcent l’admiration, et ne demandent qu’à être prises au mot.

C’est là que, souvent, le bât blesse. Car il ne suffit pas d’afficher un programme de dialogue pour que celui-ci soit effectif. Il ne suffit même pas – cela se saurait ! – de voir cohabiter sur un même sol des traditions contrastées pour qu’aussitôt, comme par magie, celles-ci se plaisent à partager entre elles et avec d’autres les valeurs qui les font vivre. Il ne suffit même pas – hélas, trois fois hélas… – que des croyants sincères dans leurs voies respectives cohabitent, pour que leurs cultes à Dieu et leurs services de l’homme se rejoignent en un engagement commun, condition pourtant de leur crédibilité et de leur efficacité.

Si j’avais donc un « message » à adresser, en ces jours de Noël, à mes frères et sœurs de ces contrées « carrefours » – peu importe que ce soit entre Orient et Occident ou entre Nord et Sud, entre cultures comme entre religions -, ce serait de les exhorter à concrétiser, même un tant soit peu, une si belle mission. Ni l’histoire ni la géographie, qui les ont mises en une telle position, ne feront le travail à leur place. Soyons vraiment les pontifes – au sens originel de bâtisseurs de ponts – que nous avons vocation à être. Cessons de « pontifier » en vœux pieux et autres péroraisons, et retroussons nos manches pour mettre en place les passerelles qui feront, effectivement, se rencontrer les personnes et les groupes. Faute de quoi, les uns et les autres finiront par crever de solitude, d’ignorance ou de suffisance. C’est Noël !

 

Du Père Michael L. Fitzgerald, père blanc, Nonce apostolique en Égypte

 

Là où la Sainte Famille a connu l’exil

 

Meilleurs Voeux de Noël de cette terre d’Égypte qui a accueilli la Sainte Famille.

D’après l’Évangile de Matthieu, la vie de cet Enfant né à Bethléem fut menacée. Suivant les indications de l’ange, Joseph a conduit Marie et Jésus en Égypte où donc la Saint Famille a vécu en exil.  Cela nous fait penser à tous ceux dont la vie est menacée, et surtout les chrétiens d’Irak.  Il y a aussi tous ceux qui sont forcés de quitter leurs maisons pour chercher une vie meilleure ailleurs.  Même dans ce pays d’Égypte il y a des chrétiens qui ont perdu la vie, et d’autres qui ne se sentent pas en sécurité.

Gardons toutes ces personnes dans nos prières. Que l’Enfant qui nous est né, le Prince de la Paix, soit pour nous tous, même au milieu de l’incertitude,  une source de force, de sérénité, de joie et de paix.

 

De Naïm Ateek, Sabeel, centre oecuménique de théologie de la Libération, Jérusalem

 

« … pour guider nos pas sur le chemin de la paix »  (Luc 1,79)

 

Une des plus belles images à propos de la paix nous arrive à travers ce chant de Zacharie, après la naissance de son fils, Jean le Baptiste (cf. Luc 1,68-79). A la fin du chant, Zacharie prononce une prière. « Notre Dieu est plein de tendresse et de bonté: il fera briller sur nous une lumière d’en haut, semblable à celle du soleil levant, pour éclairer ceux qui se trouvent dans la nuit et dans l’ombre de la mort, pour diriger nos pas sur le chemin de la paix. »

Pendant cette période de Noël, et alors que l’année 2010 arrive à sa fin, nous nous ressentons semblable aux gens du temps d’Isaïe: « … le droit est en recul, la justice reste inaccessible… Nous espérions voir la lumière, mais c’est surtout l’obscurité. Nous attendions que le jour se lève, mais nous marchons dans la nuit noire. Nous avançons en tâtonnant comme un aveugle près d’un mur, nous hésitons comme un homme qui ne voit pas où il va. En plein midi nous trébuchons comme dans la nuit la plus noire. Nous sommes en bonne santé, mais nous ne valons pas mieux que des morts. Nous laissons tous échapper des grognements d’ours ou des cris plaintifs de colombe.  Nous espérions de Dieu qu’il interviendrait, mais rien. Nous attendions le salut, mais il reste loin de nous » (Isaïe 59/14a. puis 9b-11 ).

Le niveau de frustration, de crainte et de violence s’est accru à la fois en Israël et en Palestine, comme dans l’ensemble des pays du Moyen-Orient. Nous éprouvons tristesse et déception face à l’échec de toutes les initiatives de paix.

La responsabilité de faire la paix incombe à la fois aux dirigeants israéliens et palestiniens. Pour que la paix l’emporte, à la fois sacrifices et compromis sont nécessaires. Il est maintenant politiquement clair que les responsables palestiniens ont déjà consenti un compromis en acceptant que leur État soit créé aux cotés de l’État d’Israël, sur 22 % de la superficie de la Palestine historique. Le gouvernement israélien attache plus de prix à la terre qu’à la paix; à la construction de colonies plus qu’aux droits de l’homme. Il recourt la rhétorique de la paix, tout en dévorant journellement la terre palestinienne. Vraiment, ses pieds ne sont pas dirigés vers le chemin de la paix. Aussi se remémore-t-on les paroles du prophète Isaïe: « Vous ne connaissez pas le chemin de la paix, et là où vous passez vous piétinez le droit. Vous préférez les voies détournées, et quiconque emprunte vos chemins ne connaîtra jamais la paix » (Isaïe 59,8  ).

Nous croyons que la venue de Jésus-Christ nous a révélé le chemin de la paix, et que nous pouvons diriger nos pas sur le chemin de la paix. La paix doit se construire sur la vérité, la justice et la miséricorde. Sa logique est celle de l’amour. Elle ne doit pas écraser l’ennemi. Elle doit voir Dieu sur le visage de l’autre, même sur celui de l’ennemi. Chaque fois qu’une résistance active s’impose, elle doit employer des moyens non-violents pour briser l’injustice et l’oppression. Finalement, pour arriver à une paix durable, nous devons aimer pour les autres – même pour nos ennemis – ce que nous aimons pour nous-mêmes.  La paix ne peut se construire que sur une telle base.

« Heureux ceux qui créent la paix autour d’eux, car Dieu les appellera ses fils»(Matthieu 5,9 )

 

Du Père Fadi Daou, Beyrouth

 

Ils sont l’étoile de Noël

Lors d’un récent passage dans une librairie en France, j’ai remarqué que le rayon sur les chrétiens d’Orient occupe la place de choix et il est bien rempli d’anciennes et de nouvelles publications. Sans doute les tristes nouvelles qui arrivent d’Irak et parfois d’autres pays du Moyen-Orient suscitent ce regain d’intérêt pour ce sujet. Tant mieux, sauf si ce n’est que la plupart des livres exposés portent dans leur titre le verbe « disparaître » ou l’une de ses déclinaisons funestes.

Selon la logique des hommes, ce pessimisme blessant pourrait se justifier. Mais Dieu a une autre logique. Le foi chrétienne nous situe dans le temps de Dieu et nous invite à l’accueillir dans l’enfant de la crèche et le Christ de la croix, et à y percevoir sa puissance d’amour et sa gloire.

C’est pourquoi, celui qui regarde les chrétiens d’Orient avec les yeux de la foi voit en eux la révélation la plus authentique du corps mystique du Christ et de sa présence dans le monde. Comme lui qui n’était accueilli lors de sa venue au monde que dans une crèche, eux aussi sont « en séjour » sur une terre qui la partage avec d’autres sans jamais se l’approprier. Comme lui, manifestant dans son enfance, la fragilité de son existence, eux aussi assument le dénuement de toute logique de puissance. Comme lui qui, face au mal en perspective, s’ouvre dès sa naissance au mystère salvifique du don ultime de soi sur la croix, eux aussi, face à la haine aveugle et à la terreur absurde, ils refusent de s’enfermer dans une logique de rejet de l’autre ou de repli sur soi ; ils s’abandonnent plutôt à la providence en restant inébranlables dans leur fidélité au Père et leur mission d’être le sel de la terre, cette terre qui recueille le sang de leurs martyrs et fait germer les semences de leurs saints.

Aussi, leur disparition n’en est-elle pas une. Elle serait plutôt comme celle du Christ : une croix glorieuse ou un tombeau vide, source de vie. Les chrétiens d’Orient sont donc dans la nuit de ce monde comme l’étoile de Noël qui indique le lieu de la véritable présence de Dieu et guide vers lui. Comme l’étoile, ils ne disparaitront que quand le soleil se lèvera et que le monde tout entier sera illuminé par « le jour du Seigneur ». Ce qui est considéré comme « disparition » n’est donc qu’une forme de transfiguration pour l’Eglise et pour le monde. C’est pourquoi, je fus bouleversé et attristé devant ce rayon de livres, non pour la situation des chrétiens d’Orient, mais pour la mécompréhension de leur message et de leur mission, pour l’étiolement de l’horizon d’espérance chez ces auteurs et lecteurs, et la disparition pour eux de la lumière de Pâques et du feu de la Pentecôte. Il ne s’agit pas de nier la réalité, mais de refuser de tuer deux fois ces martyrs de la foi. Après leur mort physique, le danger est de dénigrer le sens de leur vie et de leur martyre. Je ne crains pas pour les chrétiens d’Orient de celui qui tue le corps, mais plutôt de celui qui leur fait perdre leur âme et leur force intérieure. Et ce dernier, cet ennemi, peut être en chacun de nous, à chaque fois que nous oublions que dans tout ce qu’ils vivent, ces chrétiens sont pour le monde ainsi que pour l’Eglise universelle l’étoile de Noël. Sinon, comment trouvera-t-on aujourd’hui la crèche du Verbe fait chair si on ne sait plus lire les signes des temps et du ciel ?

 

Du Frère Jean-Jacques Pérennès, dominicain, Le Caire

 

Noël entre Bagdad et Alger

 

Que signifie célébrer Noël quand on vit dans le monde arabe ?

Ce mois de décembre, j’ai eu le privilège de rendre visite aux chrétiens d’Irak et à ceux d’Algérie. A Bagdad, on est encore sous le choc du terrible attentat qui a tué 46 chrétiens fin novembre dans la cathédrale syriaque catholique de Bagdad, accélérant la panique et l’émigration des chrétiens. En Algérie, en revanche, où les chrétiens ne sont plus depuis longtemps qu’un petit troupeau, on vient de célébrer la restauration remarquable de la basilique Notre-Dame d’Afrique et la cathédrale plus discrète d’Oran, où Pierre Claverie fut assassiné en 1996. Deux lieux où des chrétiens sont appelés à vivre dans la vulnérabilité. Il n’est jamais simple d’accepter d’être petit, fragile, levain dans la pâte, sans voir les fruits de ses efforts.

Une amie m’envoie comme cadeau de Noël ce mot de Frère Christophe, moine de Tibhirine : « Quelle vérité entendons-nous à Noël ? Il m’a semblé entendre ceci : que naître est une histoire, que naître prend du temps, que naître exige des arrachements, des dépouillements : il faut fuir quand l’enfant en nous est menacé, cet enfant qui n’est pas du monde. Noël n’est pas un rêve, n’est pas un mythe. La nativité de Jésus est un récit : l’Éternel se raconte dans le temps, dans une histoire vraie. Dieu se raconte en Jésus, son Fils, pour nous faire entrer dans son éternelle naissance, pour nous donner accès à son éternelle Enfance. Et chaque jour, il nous faut reprendre ce récit, relire l’histoire du Verbe fait chair, du Langage fait homme : connaître Jésus afin de naître avec Lui, en Lui. » (Homélie pour les saints innocents, 28 décembre 1990).

Osons accueillir l’Enfant et célébrer Noël dans nos situations fragiles, blessées. Il y donne sens plus que partout.

 

Du Père Manuel Musallam, de GAZA

 

EN SOUVENIR DE LA

2ème ANNEE DE LA GUERRE CONTRE GAZA

 

Aux appelés, aimés de Dieu le Père et gardés pour Jésus Christ.

A vous miséricorde et paix et charité en abondance. (Jude 1: 2)

 

Vers GAZA tournez vos cœurs et vos prières

 

Si NOËL n’est pas présent à GAZA, NOËL est absent  de LA PALESTINE

Si la JOIE est absente à GAZA, elle l’est aussi en PALESTINE

Si les Enfants de GAZA pleurent, tous les Enfants de Palestine pleurent aussi

Les Enfants de GAZA ont besoin de votre solidarité

Gaza veut être protégé par le Monde Libre

Faites Justice contre le blocus inique et la prison à ciel ouvert que subit GAZA

C’est MAINTENANT qu’il vous faut vivre votre volonté de LIBERTÉ pour GAZA

Gaza a  besoin d’une chose, être protégé par LE MONDE, contres les crimes d’Israël

 

Moi, Abouna Manuel MUSALLAM,

J’étais dans la bande de Gaza pendant la guerre « Opération Plomb Durci » et j’ai souffert avec mon peuple pendant 22 jours. J’ai vu de mes propres yeux une bombe phosphorique dans la cour de l’école. J’ai vu des gens blessés par ces bombes au phosphore, bien que ces bombes soient interdites.

Soyez courageux pour dire «Non» à Israël

ou de dire: «Arrêtez de tuer »

et « Arrêtez de décider la guerre ».

Ce qui s’est passé à Gaza n’était pas une guerre. Une guerre, c’est un affrontement entre des soldats, des avions et des armes. Nous avons été victimes, seulement des victimes. Les israéliens ont détruit Gaza. J’étais là et j’ai vu de mes propres yeux ce qui s’est passé.

Nous ne voulons pas mourir pour libérer notre pays. Nous voulons vivre pour le construire. Mais si mort nous est imposée, tous nous allons mourir courageux et fidèles.

Malgré toutes les difficultés, les crimes et la guerre, nous les Palestiniens, disons la paix est possible si la justice en question, celle d’avoir un État, reconnu dans ses frontières, et reconnu par la Communauté Internationale. Alors, la justice sera le cadre de la paix.

Pour comprendre Noël à Bethléem il faut entrer par la blessure de Gaza.

Ainsi on donne Gloire à Dieu et l’on reçoit PAIX .

Que le Seigneur de la paix vous donne lui-même la paix en tout temps et de toute manière. Que le Seigneur soit avec vous tous.( 2Th 3:16)

 

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