Pour un dialogue constructif avec les musulmans.

Pour un dialogue constructif avec les musulmans.

Non aux exactions commises contre leur communauté

L’onde de choc provoquée par l’horrible assassinat perpétré à Conflans Sainte-Honorine à l’encontre d’un enseignant qui, « héros tranquille de la liberté» (1), rentrait paisiblement chez lui après avoir dispensé ses cours, a profondément bouleversé notre pays. La nation s’est sentie, pour un temps, toute entière réunie autour des valeurs fondamentales de la République, en particulier le droit à la liberté d’expression.

Désormais, l’heure est à l’inventaire des renoncements, des abandons et des fautes qui ont permis, facilité ou incité cet acte révoltant.

Au-delà du débat légitime qui doit s’instaurer dans une démocratie à propos d’une longue suite d’actes terroristes odieux et les moyens de combattre leur perpétuation, il est urgent de s’engager énergiquement à préserver notre unité nationale.

Le risque est fort en effet de voir en particulier à nouveau stigmatiser la communauté musulmane dans son ensemble. Des exactions odieuses ont déjà été commises notamment à l’égard de mosquées, relayées par des appels criminels à la violence. Ces bouffées de paranoïa collectives sont hélas rituelles dans de telles circonstances.

Elles ont en l’occurrence une signification que manifestement leurs auteurs ne perçoivent pas. Elles constituent exactement l’objectif que se sont assignés les commanditaires et les manipulateurs des criminels qui agissent sur le sol français. Nul n’ignore en effet qu’ils cherchent à diviser radicalement la communauté nationale notamment en cherchant à retrancher de celle-ci la communauté musulmane pour affaiblir puis anéantir nos institutions, notre cohésion, notre mode de vie fondé sur la tolérance en particulier quant à la foi de chacun, ce dont notre histoire nous a montré, souvent dramatiquement, l’importance cruciale.

Heureusement des voix justes s’élèvent aussitôt de toutes parts contre les amalgames, l’appel au lynchage, la stigmatisation.

Chrétiens de la Méditerranée, qui s’est donné pour ambition de rechercher inlassablement les chemins qui peuvent faire prospérer la paix dans un espace géographique où tensions et conflits se multiplient, est fondamentalement solidaire de cette démarche (2) qui participe étroitement de la compréhension des religions et du dialogue inter-religieux.

Nous avons donc à cœur de mettre en ligne ici plusieurs déclarations qui témoignent de cette lutte en faveur de la tolérance, laquelle doit être réinventée chaque jour.

Il s’agit de messages émanant :

– du Service National pour les relations avec les musulmans – Conférence des Evêques de France

– du groupe Imams-Prêtres de Marseille

– de l’équipe de l’Institut d’études de l’Islam et des sociétés du monde musulman (IISM – HESS/CNRS)

– du Groupe d’Amitié Islamo-chrétienne (GAIC)

– de l’Esplanade des Cultures et des Religions de Bussy Saint Georges (Seine et Marne)

CDM

 

(1) Robert Badinter, interview à France Inter le 21 octobre 2020 – L’invité de 7h 50.

(2) Voir l’éditorial de Patrick Gérault, Président de Chrétiens de la Méditerranée, « L’indispensable concorde autour des valeurs de la République » publié sur notre site le 21 octobre 2021.

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Liberté et fraternité : il est temps !

Comuniqué du Service National des Relations avec les Musulmans de la Conférence des Evêques de France. Publié le 21 octobre 2020

https://relations-catholiques-musulmans.cef.fr/actualites-et-initiatives/actualites/292510-liberte-fraternite-temps/

Je ne vois pas d’autre issue : que chacun de nous fasse un retour sur lui-même et extirpe et anéantisse en lui tout ce qu’il croit devoir anéantir chez les autres. Et soyons bien convaincus que le moindre atome de haine que nous ajoutons à ce monde nous le rend plus inhospitalier qu’il ne l’est déjà. Je ne crois plus que nous puissions corriger quoi que ce soit dans le monde extérieur que nous n’ayons d’abord corrigé en nous »[1].

C’est avec ces mots d’Etty Hillesum, jeune juive morte à Auschwitz en 1941, que nous souhaitons d’abord réagir à l’événement qui vient d’endeuiller la France, à savoir l’horrible assassinat de Mr Samuel Paty.

Face à l’horreur et à l’impensable, lorsque le seuil de l’école est franchi par la violence à travers l’assassinat d’un enseignant, comment ne pas se révolter, dénoncer, accuser et rejeter l’autre venu d’ailleurs et qui, au nom de sa religion, l’islam, ôte la vie d’un être humain, d’un époux, d’un père, d’un enseignant ?

Notre première réaction est avant tout une profonde tristesse pour cette victime et sa famille et la compassion pour leur immense douleur.

En fraternité

Nous pensons à tous ses collègues, ses élèves, à l’ensemble des enseignants de ce pays, qui aiment leur métier et s’y donnent à fond pour construire avec les jeunes qui leur sont confiés l’avenir de notre nation.

Nous pensons aussi aux musulmans de ce pays, heurtés profondément par ce qui vient de se passer et qui, par des voix multiples, ont exprimé leur douleur et la condamnation sans condition de cet acte revendiqué au nom de leur religion qu’ils estiment ici dévoyée. Nous connaissons le travail de beaucoup de musulmans pour éduquer les consciences, relire les textes fondateurs à la lumière de notre temps, même si un long chemin reste à parcourir encore pour contrer les forces obscurantistes.

Liberté et fraternité

Nous pensons à notre pays, la France, aux valeurs qui la fondent en sa devise : liberté, égalité, fraternité, sans cesse à proclamer mais surtout à mettre en œuvre au quotidien, sachant que l’une ne va pas sans l’autre et que l’une ne prévaut jamais sur l’autre.

Notre société a un urgent besoin aujourd’hui d’une fraternité qui « a quelque chose de positif à dire à la liberté et à l’égalité ». Car, comme le rappelle le pape François dans son encyclique Fratelli Tutti, « sans une fraternité cultivée consciemment, sans une volonté politique de fraternité, traduite en éducation à la fraternité, au dialogue, à la découverte de la réciprocité et de l’enrichissement mutuel comme valeur, (…) la liberté s’affaiblit » [2]. Elle doit toujours s’articuler avec la fraternité.

En ces jours où la liberté d’expression est rappelée avec force, nous nous souvenons qu’elle est un droit fondamental. Elle n’est cependant pas un absolu. La loi elle-même rappelle que certains propos sont interdits : “ l’incitation à la haine raciale, ethnique ou religieuse, l’apologie de crimes de guerre, les propos discriminatoires à raison d’orientations sexuelles ou d’un handicap, l’incitation à l’usage de produits stupéfiants, le négationnisme” [3]. Au nom de la fraternité humaine, il est nécessaire d’approfondir la manière d’exercer la liberté d’expression dans le respect de l’altérité.

Nous vivons dans un monde blessé, une société meurtrie, sans cesse menacée par la violence, l’intolérance et le rejet de l’autre.

Les difficultés qui sont énormes sont une opportunité pour grandir et non une excuse à une tristesse inerte qui favorise la soumission. Mais ne le faisons pas seuls, individuellement. ( …) Nous sommes invités à nous mobiliser et à nous retrouver dans un « nous » qui soit plus fort que la somme de petites individualités” [4]. La liberté est à ce prix. Elle convoque un partenariat d’égaux qui va jusqu’à la fraternité.

Diversité et laïcité

Toutes ces dernières années, nous nous sommes habitués à ne voir que ce qui va mal, ce qui dérange notre confort, contrarie nos intérêts propres. N’est-il pas temps de regarder ce que nous offre notre monde, notre pays, la France, notre société pluriculturelle ? N’est-il pas temps de nous réjouir de ce que nous recevons les uns des autres du fait même de notre diversité que facilite la laïcité ?

Cette dernière est mise à mal par des voix contraires. Il y a celles qui la dénoncent, ne voyant en elle qu’un athéisme niant la place des religions. Il y a celles qui la défendent comme le dernier rempart face à des religions qui ne seraient qu’obscurantismes. Il y a celles qui l’instrumentalisent et en font une religion qui prévaut sur tout le reste.

Mais la laïcité n’est-elle pas voulue depuis l’origine dans la loi de 1905, comme le creuset qui permet aux différences religieuses, philosophiques et d’opinion de s’exprimer librement ?

Il est urgent de rappeler que “la laïcité n’est pas une opinion parmi d’autres, mais la liberté d’en avoir une. Elle n’est pas une conviction, mais le principe qui les autorise toutes, sous réserve du respect de l’ordre public”[5]. C’est l’État qui est laïc et non la société. La dimension spirituelle y a toute sa place.

Les défis à relever

L’assassinat de Samuel Paty vient interpeller notre être ensemble, notre hospitalité, les fondements de notre société, la question de l’éducation, notre rapport à la religion, l’accueil des migrants. Il nous lance autant de défis pour répondre à ces questions, non plus par des discours, de bonnes intentions, mais par des actes concrets qui appellent une conversion profonde de nos manières d’être, de vivre ensemble, de faire société, d’habiter notre Maison commune.

Cet appel est lancé à chacun et chacune de nous, là où nous sommes, comme citoyen(ne)s et croyant(e)s.

Que nous faut-il inventer, mettre en œuvre ? Qui d’entre nous est prêt à écouter, discerner, accompagner, accueillir ? Qui d’entre nous est prêt à se confronter à la pensée de l’autre, à dialoguer, à exercer l’esprit critique et le débat ? Qui d’entre nous est prêt à s’engager auprès des enfants et des jeunes dans un travail d’éducation qui prenne en compte la personne dans toutes ses dimensions, matérielles et spirituelles ? Qui d’entre nous est prêt à lâcher son agenda pour prendre le temps de tisser la fraternité ?

Faudra-t-il un autre malheur pour entrer dans l’urgence des changements à opérer ? Il n’est que temps de nous réveiller.

Nous souvenant de toutes les victimes du terrorisme de par le monde, nous revient à l’esprit la prière de Christian de Chergé formulée après la visite au monastère de Tibhirine des islamistes algériens qu’il appelait les « frères de la montagne » :

Je ne peux pas demander au bon Dieu : « Tue-le ! »… Pas possible ! Alors ma prière est venue : « Désarme-le, désarme-les ! » Ça, j’ai le droit de le demander. Et puis après, je me suis dit : « Est-ce que j’ai le droit de demander : « Désarme-le ! », si je ne commence pas par dire : « Désarme-moi et désarme-nous en communauté ! » Et, en fait, oui, c’est ma prière quotidienne, je vous la confie tout simplement ; tous les soirs, je dis : « Désarme-moi, désarme-nous, désarme-les ! » [6]

21 octobre 2020

P. Vincent Feroldi

Sr Colette Hamza

Mgr Claude Rault

P. Pierre Belhache,

Service national pour les relations avec les musulmans

[1] Etty Hillesum (trad. Philippe Noble), Une vie bouleversée : Journal 1941-1943 [« Het verstoorde leven »], Paris, Éditions du Seuil, 1985.

[2] Pape François, Lettre encyclique Fratelli Tutti sur la fraternité et l’amitié sociale, n° 103, octobre 2020.

[3] https://www.maisondesjournalistes.org/les-limites-de-la-liberte-dexpression/

[4] Ibid n°78.

[5] https://www.gouvernement.fr/qu-est-ce-que-la-laicite

[6] Christian de Chergé, L’invincible Espérance, 1997, Bayard Éditions.

Texte complet de la déclaration du SNRM :

https://relations-catholiques-musulmans.cef.fr/wp-content/uploads/sites/17/2020/10/de%CC%81claration_-SNRM_201021_vo.pdf

NDLR. Transmis par Christophe Roucou, directeur de la revue “Chemins de Dialogue”, liée à l’Institut Chrétien de la Méditerranée et partenaire marquant de “Chrétiens de la Méditerranée”, et Christian Delorme, prêtre du diocèse de Lyon, coordinateur de 25 groupes interreligieux de Lyon-Métropole, qui fait le commentaire suivant :

« En ces temps difficiles où la violence et la haine menacent notre société, mettent en danger le “vivre ensemble” auquel nous sommes attachés, parler peut paraître dérisoire. Comme cela a été dit par beaucoup: étant donné la gravité de la situation, on ne peut plus se contenter de déclarations généreuses, de bougies éclairées, etc, mais il faut de actes forts capables de casser la dynamique de la haine, l’obscurantisme religieux, les manipulations étrangères…

Dans la masse des déclarations diffusées ces jours-ci, et dont bien peu sans doute ont été lues, mon attention a été attirée par celle qu’ont publiée ce 21 octobre les animateurs du Service épiscopal des Relations avec les Musulmans ( SNRM ). Je me permets de vous la partager ( dans l’éventualité où vous n’en auriez encore pas pris connaissance ) car elle m’est apparue plus “consistante” que la plupart des autres qui m’étaient parvenues. »

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Message du groupe imams-prêtres de Marseille à la suite de l’assassinat de Samuel Paty

Nous sommes un groupe amical constitué d’imams et de prêtres de Marseille, auxquels s’ajoutent une croyante musulmane et une religieuse catholique. De manière régulière, depuis 10 ans, nous nous rencontrons pour échanger, partager et approfondir ensemble par l’écoute, la réflexion, le questionnement des éléments de notre foi, de notre culture, des faits de société.

Nous sommes convaincus que nous appartenons à la même humanité, que nous sommes des êtres de relation et que nos origines, nos opinions, nos courants politiques et nos religions sont des lieux de découvertes et d’enrichissement mutuels.

Comme l’ensemble de la communauté nationale française, nous sommes profondément choqués par l’horrible assassinat dont a été victime Monsieur Samuel Paty, professeur d’histoire du Collège de Conflans Sainte-Honorine. Cet assassinat lâche et abject d’un enseignant porte atteinte à des principes fondamentaux de la République comme la liberté d’expression, la liberté de conscience, la laïcité. Nous sommes profondément convaincus du bien-fondé de ces principes. Nous voulons exprimer notre soutien à la famille de Monsieur Samuel Paty, à ses proches et à tous les personnels de l’Éducation Nationale. Nous reconnaissons l’importance de leur travail.

Notre groupe est modeste mais il est un signe parmi d’autres que c’est dans le dialogue mené avec franchise et respect que les ignorances, les amalgames, les préjugés reculeront et laisseront davantage place à un vivre ensemble plus pacifié et plus fraternel. L’ouvrage est devant nous et il a besoin de chacun.

Plus que jamais parlons ensemble, comme citoyens et comme croyants, du civisme, de laïcité, du fait religieux, de la place des religions, de la violence, du terrorisme, dans le débat public et dans tous les lieux d’éducation de jeunes, y compris, sur invitation, dans les établissements scolaires publics et privés. Ce n’est qu’en mettant des mots que l’on fera reculer l’ignorance et le barbarisme.

Nous sommes inquiets du climat qui s’alourdit dans notre pays et cible les musulmans et leurs structures qui travaillent dans un cadre républicain.

Nous sommes disponibles pour toute initiative qui nous conduirait à témoigner ensemble, avec des croyants des autres traditions religieuses et des agnostiques, de ce qui nous pousse à servir la devise républicaine dans ses trois dimensions « liberté, égalité, fraternité ».

Nous ne voulons pas céder à la peur ou à la division.

Nous avons décidé de vivre ensemble, unis dans la fraternité et unis dans le défi et le bienfait d’accueillir nos diversités.

Marseille, le 21 octobre 2020

Messieurs Azzedine Aïnouche, Farid Bourouba, Salim Bouzred, Haroun Derbal, Nassurdine Haïdari, Mohsen Ngazou, Abdessalem Souiki, Madame Saïda Driouiche.

Pères Thierry Alfano, Jean-Louis Barrain, Philippe Barrucand, Martin Durin, Jean Lahondès, Jean-Pol Lejeune, Laurent Notareschi, Christophe Roucou, sœur Christine Pousset.

NDLR. Texte communiqué par Christophe Roucou, directeur de la revue “Chemins de dialogue”.

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Institut d’études de l’Islam et des sociétés du monde musulman (IISMM – HESS/CNRS)

Hommage à Samuel Paty

L’équipe de l’Institut d’études de l’Islam et des sociétés du monde musulman (IISMM EHESS/CNRS) exprime sa vive émotion à la suite de l’acte de terrorisme dont a été victime vendredi 16 octobre Samuel Paty, professeur d’histoire-géographie. Il a été revendiqué par un individu ayant adhéré à une conception intégraliste, intransigeante et violente de l’islam.

Nos pensées vont à la famille de Samuel Paty, à ses proches, à ses collègues et à ses élèves, à qui nous adressons nos sincères condoléances.

Nous adressons notre soutien à tous les enseignants et à toutes les enseignantes pour défendre leur liberté d’enseigner et de chercher, qui est aussi la nôtre. Ils et elles doivent pouvoir le faire sans tabou, y compris religieux, en rendant compte de la complexité des problématiques et dans le respect des personnes, en faisant confiance à leur intelligence.

Plus que jamais, l’IISMM continuera à se mobiliser pour tenter d’apporter des outils de compréhension dans son champ de compétence.

Institut d’études de l’Islam et des sociétés du monde musulman. UMS 2000 – CNRS – EHESS

École des hautes études en sciences sociales (EHESS)

96, boulevard Raspail 75006 Paris

http://iismm.ehess.fr/

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Groupe d’Amitié Islamo-chrétienne (GAIC)

Communiqué

Le 16 octobre 2020, Samuel Paty, professeur de collège à Conflans-Ste-Honorine, a été victime d’un odieux assassinat par un jeune de 18 ans prétendant agir au nom de Dieu.

Les chrétiens et les musulmans du Groupe d’Amitié Islamo-Chrétien (GAIC) expriment leur commune sidération, indignation et condamnation d’un tel meurtre, que rien ne peut excuser.

Des mosquées, des associations et des groupes interreligieux ont aussitôt publié des communiqués sur les réseaux sociaux. Mais nous constatons qu’ils demeurent trop peu relayés dans les grands médias nationaux. Pourtant, leur cri du cœur appelant à faire corps avec la nation doit être entendu car ils sont en première ligne pour combattre l’obscurantisme et le fanatisme religieux.

Les réseaux sociaux sont trop souvent utilisés habilement par le terrorisme pour manipuler les jeunes en situation de faiblesse et de révolte tout azimut. Face à la puissance de ces réseaux sociaux véhiculant des appels à la haine et au meurtre, notre société devra trouver des réponses éducatives et pénales, à la hauteur de ce fléau, qui n’a rien à voir avec la liberté d’expression.

En tant que GAIC, après 27 ans de rencontre, nous en appelons au sens civique de tous les Français. Nous pouvons en témoigner, il est possible de travailler ensemble dans un climat d’amitié pour promouvoir la liberté, l’égalité et la fraternité dans le cadre de la laïcité.

Paris, le 19 octobre 2020

Hélène MILLET et Haydar DEMIRYUREK

http://www.gaic-seric.info/2020/10/communique-du-gaic.htm

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Esplanade des Religions et des Cultures de Bussy St Georges

Message des responsables des religions à Bussy St Georges à
l’inspectrice d’académie de Seine et Marne

19 octobre 2020

Les communautés religieuses de Bussy Saint Georges (77) ont appris avec effroi l’attentat dont a été victime un professeur d’histoire du collège de Conflans Saint-Honorine et ont organisé un rassemblement dimanche 18 octobre pour exprimer leur soutien à la famille de Samuel Paty, à ses proches et aux personnels de l’Education nationale.

Les fidèles des différentes religions sont profondément endeuillés, et au-delà l’ensemble des habitants de notre ville et ses alentours.

L’assassinat lâche et abject d’un enseignant porte atteinte à des principes fondamentaux de la République comme la liberté d’expression, la liberté de conscience, la laïcité.

L’association de l’Esplanade des Religions et des Cultures regroupe les communautés bouddhistes, catholique, hindouiste, juive, musulmane et protestantes. Depuis 2012, nous avons appris à vivre ensemble en bon voisinage, à devenir curieux de connaître la religion des autres, à nous inviter pour nos fêtes, à proposer des initiatives communes pour la planète, pour la paix, en particulier aux moments des attentats.

En 2019, nous avons accueillis près de 2000 personnes venues visiter nos lieux de culte, dont beaucoup de jeunes, pour leur faire découvrir la richesse de la connaissance des religions et de leur apport dans la vie sociale. La municipalité et les pouvoirs publics reconnaissent cet apport précieux au vivre ensemble.

Quand les religions se présentent ensemble, elles peuvent apporter beaucoup à la société et à l’école, par exemple dans le cadre de l’enseignement du fait religieux. En 2015, après les attentats de janvier, nous avions écrit à l’inspectrice d’Académie :

« Il nous semble qu’il y aurait un grand intérêt à ce que les jeunes des collèges et des lycées de notre secteur entendent des responsables des différentes religions dire ensemble comment ils voient les questions de la violence et du lien social, et qu’ils puissent leur poser des questions. Cela serait de nature, nous semble-t-il, à éviter les amalgames et permettrait aux jeunes de dialoguer ensuite entre eux et avec leurs enseignants en connaissance de cause. Cela pourrait participer à l’effort d’instruction civique des élèves et d’initiation aux valeurs républicaines.

Une telle intervention, dans le cadre strict de l’éducation civique des élèves, nous semble correspondre à l’esprit de la laïcité, qui n’est pas à vivre contre les religions, mais avec elles, quand elles sont ensemble pour favoriser le vivre ensemble et la paix sociale. »

Malheureusement, nous n’avions pas eu de réponse. Aujourd’hui, après ce qui s’est passé au collège de Conflans Sainte-Honorine, nous réitérons notre proposition, car elle nous semble aller dans le sens d’une société plus apaisée et plus fraternelle.

Les collèges et lycées qui viennent visiter notre Esplanade des Religions et des Cultures proviennent actuellement de l’enseignement confessionnel. Nous serions heureux que des établissements de l’Education nationale puissent aussi profiter de cette expérience.

Cette année, nous avions choisi comme thème de nos initiatives communes les Droits de l’enfant, droits à une éducation ouverte, à la connaissance des religions et cultures, à l’esprit critique et à la liberté d’expression éclairée. Dans le respect des mesures sanitaires, nous allons proposer dans les mois qui viennent des rencontres interreligieuses sur ces thèmes.

Farid Chaoui, Président de l’Esplanade des Religions et des Cultures

P. Dominique Fontaine, Secrétaire de l’Esplanade

NDLR Texte transmis par Christophe Roucou, directeur de la revue “Chemins de Dialogue”.

Photo Fo Guang Shan / Esplanade des religions de Bussy-Saint-Georges

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